Lettre n°114, Novembre 2010
Il est parti, tout doucement
Alors que l’hiver approche lentement, un orgue est partit tout doucement en ce mois d’octobre écoulé.
En caisses depuis son démontage débuté le 10 juin 1985, il attendait inexorablement une nouvelle affectation. En vain, pendant 25 années, l’orgue Micot-Wenner provenant de la cathédrale Saint André de Bordeaux et de l’abbatiale Sainte-Croix croupissait dans les calles du vieux clocher de l’abbatiale bénédictine et dans une pièce de l’ancienne galerie du cloître.
Il faut dire que cet instrument en a vu des vertes et des pas mures, passez-moi l’expression ! Tout commença en l’église Saint-Pierre de La Réole où les Micot père et fils construisirent en 1767 un orgue de 3 ou 4 claviers et moins de 30 jeux. Au Concordat, Monseigneur d’Aviau, archevêque de Bordeaux réquisitionna cet instrument pour sa cathédrale dépourvue d’orgue depuis les troubles révolutionnaires.
Les facteurs Joseph Isnard et Simon Baïssac-Labruyère installèrent donc l’orgue réolais en l’église métropolitaine bordelaise en 1804. Hélas, l’orgue jugé très vite insuffisant pour le vaste vaisseau de la cathédrale, le prélat aidé de quelques noms du monde de la musique à Bordeaux, décida d’échanger son orgue avec celui construit par Dom Bedos en 1748 en l’abbatiale Sainte Croix. Le buffet de la cathédrale fut agrandit et modifié pour l’occasion.
A Sainte-Croix, on ne toucha pas au buffet. En 1856, les facteurs Wenner & Götty reconstruisirent l’orgue à 3 claviers et 40 jeux dans un buffet peint en marron. Un grand nombre de jeux de Micot furent conservés. L’orgue resta « dans son jus » jusqu’en 1985 date à laquelle il fut entièrement démonté pour restituer le Dom Bedos d’origine.
Après 25 longues années d’agonie, il est partit ou revenu à La Réole où il attend encore en caisses pour un long moment avant d’être reconstruit sur la tribune de l’église Saint-Pierre. A quand, une fin heureuse pour cet instrument ?